Poutine 2012, ou l'odyssée du futur président russe


Je m'attaque à un sujet plutôt sensible, mais c'est ça le vrai journalisme. Ecrire sans craindre de me retrouver en face d'une soupe au plutonium, ou encore de me faire torturer par des bodybuilders sortant tout droit d'un mauvais porno des années 80, avec en musique de fond katioucha d'Ivan Rebroff.

Le 24 septembre dernier, après avoir bu une certaine quantité de vodka j'allume ma télé, comme à chaque fois aux environs de 20 heures pour suivre les actualités du monde sur TV5. En effet, je fais parti de cette frange de la population habitant en métropole qui est branché sur le fuseau horaire de Karachi. Et puis à quoi bon regarder le journal du soir de la première chaîne si ce n'est pour apprendre que le monde va mal et que les syndicats continuent de défiler en adoptant le look baba-hard des années 70 ?

Bref, je me retrouve soudainement en face du premier ministre russe qui annonce sa candidature à la présidence en 2012. Tout d'abord, ma première pensée va auprès des Poutine's girls qui vont encore une fois user de ce que l'on peut définir comme la beauté glaciale venant du froid pour faire la promotion du candidat. Et puis je commence à me dire que Poutine a finalement quitté la présidence le temps d'un mandat, juste pour pouvoir profiter des charmes de la vie. Faire un dvd d'apprentissage du judo, conduire une formule 1, pêcher torse nu dans le froid sibérien ... Au point ou l'amateur de tir à pistolet en devient même à incarner le symbole de l'homme politique le plus cool, selon un magazine américain spécialisé dans la chasse, la pêche et le camping. On est bien loin de notre Frédéric Nihous national qui est juste bon à avoir un entretien dans le Chasseur Français une fois par an afin d'aborder le problème de la chasse aux sangliers dans les forêts ardennaises.

Je dois sans doute avoir un point commun avec Vladimir, c'est mon amour indéfectible des femmes. Lors d'une soirée, il m'est arrivé de boire en compagnie d'une sublime créature brune qui par la force des choses commence à me parler de la place du cyclisme dans sa famille. Entre son père aujourd'hui à la retraite et son frère qui doit sans doute en connaître un rayon niveau produits dopants, je commence à m'imaginer certains de ses probables fantasmes. Faire l'amour sur le col du gibier tout en imitant la voix de Gérard Holtz par exemple. Mais cette dernière a perdu tout son charme quand je me suis rendu compte de sa méconnaissance totale sur la vraie rock star des circuits. L'Italien Marco Pantani, qui en plus d'avoir abusé de nombreuses orgies a surement dû confondre le parmesan avec sa réserve de cocaïne. On peut comparer sa mort avec celle du slow dans les boites de nuit. La lassitude ambiante de ce sport a sans doute participé à son suicide. Tout comme L'obsolescence du slow, qui finalement dans une société ou le sexe est un marché comme les autres a définitivement perdu sa place. L'homme n'a plus besoin d'une mélodie de qualité pour influer sur sa libido vu le succès d'un David Guetta ou encore celui d'un groupe de variété comme Louise Attaque.

En définitive je ne regrette pas mon fuseau pakistanais. Mon utopie est peut-être vaine, mais dans ce monde caricatural, j'ai fait le choix d'être une caricature grossière de moi-même.




            


Les BRICS existent-ils ?



C’est devenu un poncif de toute analyse économique et géopolitique de comptoir. Face à la crise actuelle de la zone euro et à ce qui semble être un déclin des États-Unis d’Amérique, le groupe des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) est unanimement désigné comme le nouveau cercles des superpuissances de demain. L’acronyme, popularisé par la célèbre banque d’affaires américaine Goldman-Sachs puis complété par la suite, a la cote depuis une dizaine d’années et plus encore depuis 2008-2009. Il n’est pas contestable qu’au moins quatre de ces pays (Brésil, Russie, Inde et Chine) connaissent une croissance économique soutenue, ont une démographie importante, sont des marchés présentant d’importantes perspectives et jouent un rôle politique croissant. Mais aujourd’hui, ce simple constat repris partout en chœur sans aucune originalité est à la fois incomplet, partiellement faux et insuffisant.

Il convient de se pencher un peu plus sur le sujet car, sans même être spécialiste d’économie ou de géopolitique, plusieurs faits objectifs sautent aux yeux pour qui veut bien les voir. Et le premier élément qui apparaît clairement, c’est que l’Afrique du Sud n’a rien à faire dans ce groupe. Petit pays tant par son poids démographique (à peine 50 millions de personnes, soit moins que l’Italie et à peine plus que l’Espagne) que par sa puissance économique (422 milliards de dollars en 2011, à peine la vingt-neuvième place mondiale !), le pays possède certes un certain nombre d’atouts (mines d’or et de platine, présence dans plusieurs groupes mondiaux stratégiques comme le G20) et profite de sa stature de pays moyen sur un continent encore très pauvre. Mais le ralentissement de sa croissance, ses graves problèmes structurels (baisse annoncée de la population, haut taux de chômage, maladies endémiques…) ne permettent pas de le classer parmi les BRICS… sauf par souci un peu paternaliste de valoriser de temps à autre un pays africain.

Un autre constat saute aux yeux lorsque l’on compare les quatre pays restants. Le Brésil et la Russie, aussi puissants et peuplés soient-ils, ne sont que deux nains en comparaison des deux supergéants que sont l’Inde et la Chine. Le premier des deux a considérablement rattrapé son retard économique, se plaçant en dixième position des puissances mondiales, juste derrière la Russie. Mais toutes les prévisions le donnent logiquement dans le sillage de la Chine en termes économiques d’ici à 2050. Ces conclusions n’enlèvent rien au Brésil ou à la Russie mais doivent nous permettre de relativiser leur place.

Reste un épineux problème, qui est peut-être le véritable problème des BRIC (sans le « S » cette fois-ci). Cette étiquette, collée à la va-vite, devenue abusivement synonyme de « pays émergents », ne peut masquer un manque d’unité flagrant. Ce manque d’unité est d’abord économique et démographique. La Russie, par exemple, est appelée à une chute de sa population relativement soutenue (certes proportionnellement moins importante qu’en Allemagne ou au Japon) d’ici à quarante ans, passant d’après les estimations moyennes de 140 à 120 millions d’habitants. La Chine, de son côté, va connaître un déclin démographique d’une autre sorte, dû aux ravages de la politique de l’enfant unique et au vieillissement accéléré de sa population. Seuls le Brésil et l’Inde semblent maintenir à peu près le cap, malgré de très nettes chutes de leur taux de natalité. Par ailleurs, la Chine, si elle produit énormément de matières premières, étant donné la taille et l’enrichissement de sa population, est aujourd’hui un importateur gourmand dans de nombreux domaines (alimentaire, hydrocarbures, métaux industriels et précieux…). L’Inde risque fort de suivre le même chemin, là où le Brésil et la Russie devraient rester d’importants exportateurs dans certains domaines.

À ce manque d’unité économique, encore relatif, s’ajoute un manque d’unité politique et géostratégique évident. Régulièrement présentés comme le seul contrepoids crédible à l’hyperpuissance américaine, les BRIC n’ont en fait pas les mêmes intérêts ni les mêmes orientations générales. La Russie et la Chine, alliées de circonstances dans le cadre du pacte de Shanghai, sont de toute évidence très anti-américaines. Mais ce n’est pas le cas de l’Inde et du Brésil pour des  raisons distinctes. Certes, ni Delhi, ni Brasilia ne sont des suiveurs aveugles de l’oncle Sam, mais leur opposition à Washington est loin d’être systématique. Par ailleurs, l’Inde et la Chine se regardent de plus en plus en chiens de faïence, persuadées (sans nul doute à juste titre) d’être des adversaires, sinon de francs ennemis, sur le continent asiatique. La Russie, qui a généralement une politique étrangère assez habile, tente de manipuler l’une et l’autre de ces nations dans son intérêt, tandis que le poids politique du Brésil, malgré ses efforts, reste relativement faible (notamment car le pays est le seul du groupe à ne pas disposer de l’arme atomique).

Reste à ajouter un dernier constat qui est sans doute le plus intéressant. Comme je l’ai dit précédemment, l’étiquette « BRICS » est devenue un quasi synonyme de « pays émergents », ce qui est clairement abusif. D’abord parce que la Russie n’est pas franchement émergente : elle a été puissante dans un passé proche et ne fait aujourd’hui que récupérer la place qui devrait logiquement être la sienne de par sa population et ses richesses intérieures. Ensuite parce que nombre de pays ou de blocs continentaux méritent largement l’étiquette de pays émergents. L’on pourrait longuement disserter à leur sujet, mais le cas le plus frappant est peut-être l’ensemble de l’Amérique latine, qui devient un acteur économique et démographique majeur de ce monde. Si (presque) tous les pays qui la composent connaissent une croissance soutenue sur les dernières années, deux d’entre eux (le Mexique et l’Argentine) ont déjà un poids respectable, voire important, et progressent à une vitesse impressionnante. En ce sens, si l’Union européenne avait une once d’intelligence, elle saurait que le seul vrai moyen d’accéder à ce monde émergent est de passer par ses anciennes métropoles, l’Espagne et le Portugal. Car, pour prendre la réciproque de ce que déclarait en son temps le célèbre poète espagnol Federico García Lorca, quiconque ne comprend pas l’Espagne ne comprend pas l’Amérique latine…

Nicolas Klein


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